mercredi 15 octobre 2014

Le coffre est ouvert Chapitre 8, par neo


Pris de panique, je courus devant moi sans réfléchir. Je risquai à chaque pas de glisser, tant le crachin avait imbibé le trottoir. Mon sang bouillonnait, mes tempes dansaient la samba, mes yeux voulaient s’échapper de leurs orbites. Après un temps indéfini, je m’arrêtai sous un platane, tentai de reprendre ma respiration ; mes esprits.

Analysons la situation !
Un coffre mystérieux qui paraît très ancien m’a été livré, je n’en connais pas la raison véritable. Un mot me conduit dans un jardin d’enfants. En guise d’enfants, je rencontre deux mémés foldingues de mots croisés et accessoirement de mon corps, Jacqueline et Clotilde ! En fouillant sous leur banc, dans une position que je qualifierai de grotesque, je tombe sur une tige avec cette inscription : « Cette clé scella bien des destins. Ouvre la porte et libère-les. » Je suis bien avancé !
Ma mother rapplique.
Elle connaît l’objet, puisque je l’entends marmonner : « Bien sûr cette clé n’ouvre point le coffre puisqu’elle ouvre la porte de l’Éspéranza ».
C’est quoi l’Éspéranza ?
Cerise aigre sur le gâteau pourri de ma journée de merde, j’apprends que Jacqueline et Clotilde sont amies avec Rosy, ma mère. Elles se radinent à la maison, et en plus, ont l’intention de porter plainte pour s’être soi-disant fait agresser par un pervers. En l’occurrence, moi.
Mais dans quel monde vivons-nous !
Je m’éclipse préventivement. Courageux l’Alphonse, mais pas téméraire. Je reviens sur le lieu de la honte et je trouve une autre clé en espérant qu’elle correspondra à la serrure. De retour à la maison, plus de mère plus de grand-mères : le désert ! La malle s’est fait la malle ! Comment ?
Je suis sûr que maman me cache des trucs ! Je fonce chez elle. J’actionne sa serrure avec une des clés trouvées sous le banc des mamie’s. Pourquoi ?
J’y retrouve ce damné coffiot ! Comment s’est-il transporté là ? En outre, dans le garage, je repère des dizaines de clés sagement alignées sur leur présentoir. M’man a acheté une panoplie complète du p’tit serrurier en herbe ?
Je n’arrive pas à venir à bout de cette maudite caisse antique ! Quand je tape dessus pour évacuer ma rage, y a cette musique qui se déclenche et ce bruit bizarre…
Si je m’appelais Alphonse Brown, je me dirais que shooté à la mongolienne, je finirais par me réveiller de ce very bad trip avec un maous mal de crâne... Mais moi, mon nom c’est Alphonse Fraser, et c’est pas quelques lampées de sky et deux trois taffes de tabac qui vont me faire voir la vie en scope géant sur le mur blanc de mes absences.

Pff… Voilà, j’avais résumé la situation et mon souffle était revenu. Mes idées, quoique rassemblées dans un ordre cohérent, ne m’avaient pas aiguillées sur la voie d’une explication plausible. J’en retirai un sacré paquet d’interrogations, et je ne captai pas le moindre début de commencement, d’amorçage, d’esquisse d’embryon de compréhension ! Réflexion faite, j’avais tout de même pigé qu’un détail clochait. Quand je me remémorai la conversation de Rosy avec le binôme des bas varices, curieusement, elle avait perdu son accent sudiste ! Ses « eu » ne ponctuaient pas ses fins de phras… eu… Sa voix n’était pas tout à fait la même d’ailleurs ! Enfin, il m’avait semblé.
Et cette musiquette qui s’était échappée de la boîte ? Farfelue, aux vues des circonstances : « Happy birthday to you… happy birthday to you… », alors que ce n’était pas mon anniversaire ! Quant au grattement sinistre qui m’a fait sursauter. Comme si quelqu’un, ou quelque chose désirait sortir !

Alphonse ! Ressaisis-toi mon garçon. Tout ça doit avoir une explication logique.

Par chance, je réalisai que j’étais à deux pas chez moi. Dans la panique, les jambes avaient retrouvé toutes seules le chemin du bercail. J’étais décidé à employer la manière forte. Je descendis à la cave à la recherche d’un outil. Après quelques minutes de fouilles, je récupérai un pied-de-biche, en fait une pince à décoffrer qu’un copain artisan avait oubliée. Je repartis au pas de course vers l’énigmatique malle, en dissimulant du mieux possible mon accessoire, que j’avais empaqueté dans du papier journal.

Toujours pas âme qui vive chez m’man, ou celle qui se faisait passer pour elle. Je filai dans le garage. J’entendis encore le même air, mais plus faiblement. Par contre, les grattouillements s’étaient intensifiés.
Muni de la pince à décoffrer, je m’attaquai à l’objet de mon ressentiment, au truc qui m’avait pourri mon jour de congé ! Cela faisait une éternité que je n’avais pas transpiré comme cela.
Un moment, je fus tenté par une bonne petite blonde comme je les aime : fraîches, lumineuses, pas trop amères, des bulles fines et une mousse nacrée. Mais voilà que des coups étaient assénés, maintenant ! Il fallait faire vite !
Après un ultime effort.
CRAAAAC !
Je me débarrassai de mon « passe-partout » en le jetant derrière moi. Ce que je vis me terrifia. Je reculai et trébucha sur mon outil. Salto arrière et réception sur la tête. Entre deux eaux, je discernai une ombre qui s’extrayait de la boîte. Elle s’approcha du pied-de-biche.
Je vais mourir, je pensai.
L’ombre ne me calcula même pas. Elle parut s’intéresser à la feuille de chou qui m’avait servi d’emballage. Elle déplia la double page. À la une, je distinguai vaguement un gros titre.
« Évasion de la prison de l’Éspéranza ! La police court après le fugitif. »

Ce fut mon dernier souvenir. Je sombrai dans une sorte d’inconscience, peuplée de mamies armées jusqu’aux « fausses » dents. Elles défonçaient le portail d’une prison à coup de bélier, puis libéraient des détenus dont le destin avait été scellé entre quatre murs…

3 commentaires:

  1. Oh la la ! voilà que cette histoire prend un tour tout à fait inattendu. On apprend beaucoup de choses dans cet épisode, tu as bien rempli ton office. Bravo. :-)

    RépondreSupprimer
  2. Merci Aubree, j'avais envie de l'ouvrir de damné coffre ! :)

    RépondreSupprimer
  3. tour de passe passe et repasse! Moi aussi j'avais bien envie de le faire sauter ce coffre... mais c'est la cervelle d'Alphonse qui saute

    RépondreSupprimer