Le coffre est ouvert. Van Helsing n’a eu aucun mal à
convaincre Draco d’ouvrir la malle. Le gamin n’aurait pas tenu plus longtemps
enfermé dans la malle avec toutes les protections magiques qui abondent. Il
aurait fini par exploser et ça aurait fait tache. Il a vraiment l’intention de
l’utiliser ce pauvre mortel. Belle offrande que voilà ! Un bougre
d’imbécile tout de même que cet Alphonse ! C’est pas Dieu possible
autrement pour finir sa journée sur l’autel des sacrifices ! Quelle
poisse !
La fatigue des longs siècles passés, l’amertume
d’avoir raté l’occasion d’en finir depuis longtemps avec ce damné de
Transylvanie décourage un moment Helsing. La fourgonnette empeste les relents
diaboliques mêlés à celle d’une transpiration abondante, sueur d’effroi et
d’épouvante légitime. Le vampire séculaire a repris le volant, les
succubes se chamaillent le droit d’être
à son côté. Van Helsing regarde le jeune homme dont les yeux affolés
considèrent le trio des succubes à l’avant. Une formulation muette se forme sur
ses lèvres : « Maman ? »
comprend-t-il, mais il n’ose pas plus, bien conscient de vivre un cauchemar
éveillé.
— T’en fais
pas petit, je vais te sortir de là !
Je dévisage le vieux qui se présente à
moi : « Van Helsing, me dit-il d’une voix posée et sûre
d’elle. » C’est quoi ce nom de héros fatigué ? Ça me rappelle
vaguement quelque chose mais j’ai beau cherché pas moyen de savoir où j’ai déjà
entendu ce nom.
Me sortir de là ? Il rêve éveillé le vioque ! Je
vais crever, oui ! Et sans rien comprendre à cette histoire dans laquelle
je me trouve mêlé bien malgré moi ! Je n’ai plus aucun doute, je vis mes
dernières heures dans une camionnette qui file à bonne allure vers une
destination pour le moins nébuleuse mais néanmoins récurrente. J’ai
l’impression de ne rien entendre d’autre depuis ce matin que cet
« Esperanza » de malheur ! Je suis mort de trouille, j’ai mal
partout, comme si l’on m’avait roué de coup tant mes muscles sont tendus à
l’extrême. Mes yeux reviennent sans cesse sur le conducteur et ses passagères.
Celui-ci dégage une aura de confiance qui me terrorise. Le seul regard qu’il m’a
lancé, une fois le coffre ouvert reste gravé dans ma tête. Un regard de
convoitise dont je ne veux surtout pas comprendre le sens. Je nage en plein
film d’horreur.
Van Helsing, affable, me tend une cigarette bienvenue.
Malgré mes liens, je m’en empare avec avidité. Une première bouffée salvatrice
et réconfortante allège un instant la terreur qui m’habite.
« Ecoute petit, il ne nous reste pas beaucoup de
temps. Alors pas de panique, hein ? Tu vas gentiment me laisser faire et
ne pas broncher, OK ? J’ai ici tout ce qu’il faut pour parer au plus
presser.»
Discrètement il ouvre le revers de son long manteau
d’où surgit un attirail digne de films de série Z, où tous les gadgets que l’on
préconise pour faire face aux vampires sont rassemblés. Plus rien ne m’étonne
cela dit, vous comprenez aisément pourquoi, non ?
J’ai toutefois une moue incrédule à la vue du CD.
—
Vous vous foutez de moi, là ?
je réplique en le désignant d’un geste malhabile.
—
Du tout ! Tu n’imagines pas le
service que cette fille nous a rendu le jour où elle s’est mise à chanter.
C’est mon arme ultime, je t’assure ! dit-il avec le plus grand sérieux.
La fourgonnette est suffisamment bruyante pour que
nous puissions converser en toute discrétion, d’autant que les trois vieilles
chantonnent une rengaine agaçante qui semble les ravir. Même Hubert, réjoui de
les entendre, dodeline de la tête en cadence. « Enfin libéré ! Enfin libéré ! Enfin libéré !...» scandent-t-elles
avec jubilation.
J’ai envie d’une autre cigarette mais je ne veux pas
interrompre les réflexions dans lesquelles le vieil homme est plongé. Ça cogite
dur, on dirait. Un court instant je me surprends à espérer que tout n’est
peut-être pas encore joué.
—
Dis-moi, sais-tu comment le coffre a
été ouvert ? demande le vieux au bout d’un moment.
Par le menu je lui raconte tout depuis le début,
comment en cette heureuse matinée de congé je me suis retrouvé avec ce maudit
coffre sur les bras, le coup de téléphone qui a suivi, et cette voix inconnue qui
me souhaitait bonne chance, la sortie au parc, les vieilles biques et la
première clé et ma mère qui n’est pas ma mère et le retour au parc et la
découverte de la deuxième clé qui ouvre sa maison, la musique et le grattement
sinistre, et mon courage pour ouvrir cette malle et mon kidnapping ...
J’ai la gorge sèche, j’ai tout déballé avec
précipitation de peur de ne pas en avoir le temps, je me dis que si je raconte
tout, je vais me réveiller, enfin !
—
Voilà qui est intéressant ! s’exclame
Helsing, un éclair de vivacité dans les yeux.
—
Quoi ? Qu’est ce qui est
intéressant ? je demande.
—
Le coup de téléphone reçu après la
réception du colis… répond-t-il en réfléchissant. Et tu dis que tu as ouvert le
coffre juste avec une pince à décoffrer ?
—
Euh, oui…
—
J’en ai vu des choses dans ma vie,
crois-moi, mais là, ce n’est pas banal, non vraiment pas banal…
—
Quoi ? je répète, Soyez plus
clair à la fin, je ne comprends rien à
ce que vous me dites !
Un sourire
bizarre s’affiche sur ses lèvres. Un sourire un peu surpris et soulagé en même
temps.
— Sais-tu qui
tu es mon garçon ?
Excellent cliffhanger !
RépondreSupprimerSuper ! On avance, on avance mais où va-t-on ??? :-)
RépondreSupprimer